Vous partagez vos photos avec des amis ou vous partagez vos photos à des amis ?
Un petit billet sur l’évolution assez récente du verbe partager. Ce sont des hypothèses à partir d’observations. À creuser donc ! 🕳️
La tournure en « partager à » est assez ancienne, mais n’avait pas le sens qu’elle a aujourd’hui. Il s’agissait de distribuer à un ensemble d’individus une partie de son royaume, de ses biens ou du travail. Elle est aujourd’hui taxée d’archaïsme (Larousse).
Mais voilà qu’internet et les réseaux sociaux sont passés par là ! Sans doute s’inspirant du verbe anglais « share », on s’est mis à partager des vidéos, des photos, des informations et donc à en multiplier la diffusion plutôt qu’à la diviser en parts. Mais il y a plus !
Aujourd’hui, on peut partager une vidéo (=diffuser), mais on peut aussi partager un contact (=transmettre). On peut partager son écran. On peut partager sur ou via les réseaux sociaux. Bref, le verbe « partager » s’est enrichi de nombreuses nuances de sens et de nouveaux contextes.
Mais alors d’où vient la préposition « à » plutôt que « avec » ?
C’est ce que l’on appelle une évolution de la valence du verbe. On explique. Une évolution des contextes d’emploi d’un verbe va accompagner une évolution du sens et cela est contraint par des classes sémantiques.
Exemple. On peut donner, offrir, prendre, rendre qqchose à qqun. Il y a une idée de transfert d’objet exprimée par une même construction syntaxique (qqchose à qqun). Pour partager, c’est sans doute le même phénomène qui s’est produit. Il y a bien cette idée de transfert.
Et donc on partage une information aux internautes comme on diffuse une information aux internautes. C’est une évolution par analogie. La construction « partager à » est ancienne mais ses évolutions de sens sont sans doute récentes.
Et ce qui est encore plus passionnant, c’est qu’il existe le même débat en anglais (correct ou pas ?).
🚨partager avec est encore bien vivant. Il n’y a pas de risque de disparition, juste deux emplois qui vont sans doute se spécialiser.